Lombricompostage, gestion de déchets, écologie concrête sur la région lyonnaise

(lombri)compostage

Le tri à la source des biodéchets sera obligatoire dès 2024 pour tous·tes en Europe (entreprises comme particuliers), comme le prévoit la directive européenne sur les déchets, avalisée en France par la loi AGEC. En parallèle, les sols aussi bien français qu’européens font face à une baisse du taux de matière organique, nécessitant aujourd’hui la recherche d’autres modes de fertilisation et d’amendement et donc de source de matière organique. Pour répondre à ces enjeux liés à la gestion de la fertilité des sols ainsi que la valorisation de biodéchets, les acteurs, qu’ils soient concernés par l’agriculture ou par la gestion des déchets, font aujourd’hui face aux défis de développer des filières – diversifiées – de valorisation des résidus organiques sur les territoires.

Si les méthodes industrielles (méthanisation et compostage industriel, associés à de la collecte préalable) ont le vent en poupe et présentent l’avantage de traiter de gros volumes, une remise en cause de ces modes de traitement massifs s’impose, au vu des impacts écologiques générés (émissions de gaz à effet de serre, utilisation d’eau, de matières premières et d’énergies, risques de pollutions sol-air-eau,…). Le développement d’un réseau de petites unités (composteurs de quartier ou en établissement comme préconisé par le Réseau Compost Citoyen ou micro-plateformes dispersées sur le territoire, au plus près des sources de déchets) est une alternative crédible et économiquement viable, en complément ou à la place des plateformes industrielles. Le lombricompostage, défendu par notre association depuis sa création en 2012 apporte des solutions pour faciliter encore le développement de ce maillage de petites unités, que ce soit en ville ou à la campagne.

Tout (lombri)composter ?

Avant tout, il faut absolument revenir au postulat de base : « le meilleur déchet est celui qu’on ne produit pas ».
Traduction : c’est pas parce qu’on va le donner aux vers et fabriquer du compost qu’il faut jeter des quantités phénoménales de nourriture. Ainsi, de l’échelle industrielle à l’échelle individuelle, la lutte contre le gaspillage alimentaire doit être la priorité absolue de toute politique de gestion ET de réduction des biodéchets. Valoriser 50 kg de biodéchets par an et par habitant est plus simple (et coûte moins cher) que d’en valoriser 100, idem à l’échelle d’un restaurant, d’un marché alimentaire ou d’un site de production agro-alimentaire.

Ce principe s’applique également au jardin, en agriculture ou chez les paysagistes. Paillage, mulch, tonte raisonnée, choix de végétaux adaptés, gestion différentiée d’espaces verts sont autant de techniques qui permettent de limiter la production de déchets verts (taille, tontes, feuilles mortes,…) qui finissent en déchetterie puis sur les plateformes de compostage, quand ils ne sont pas brûlés, pratique interdite au passage.

Les formations guide et maître composteur mettent de plus en plus l’accent sur ces questions de réduction (gaspillage alimentaires et déchets du jardin) et c’est tant mieux.

Vous avez suffisamment réduit vos quantités de déchets organiques ? On passe à l’étape suivante : compostage ou lombricompostage ?

À froid...

Le lombricompostage, tout comme le compostage est un processus contrôlé de décomposition de la matière organique qui a pour objectif final de produire un amendement permettant d’augmenter la fertilité du sol. La différence majeure avec le compostage est l’apport de vers de terre en amont du processus de décomposition pour aider et accélérer le processus de stabilisation des déchets (Lim et al., 2016). Les vers de terre utilisés sont généralement des épigés qui vivent naturellement dans la litière car ils se reproduisent vite et consomment une grande quantité de matière organique. L’organisation de la « migration des vers », pour pouvoir récolter le lombricompost (ou vermicompost) sans sortir les vers est l’autre spécificité fondamentale de cette technique. Le processus de vermicompostage est dit «  à froid  » (moins de 30°), ou avec une chauffe très limitée et contrôlée, afin de maintenir la population de vers ainsi que le reste de la meso et macrofaune du compost (collemboles, cloportes, coléoptères, milles-pattes,…) durant tout le processus.

Le lombricompostage se pratique à toute échelle, du lombricomposteur d’appartement à la plateforme agricole, en passant par les lombricomposteurs collectifs que nous affectionnons tant.

D’autres techniques de compostage peuvent également se dérouler sans montée en température (à commencer par le composteur individuel au fond du jardin qui bien souvent ne chauffe pas). Le vermicompostage est donc une optimisation du compostage « à froid » par l’apport de vers au démarrage et par l’organisation de la migration des vers durant le processus .

… ou à chaud 

Le compostage thermique est différent puisqu’il prend appui sur une succession de trois phases distinctes : une phase thermophile où la température peut monter jusqu’à 70°C, une phase de refroidissement durant laquelle la température diminue et une dernière phase de maturation. Différents groupes de micro-organismes (bactéries, champignons, archées) se succèdent au cours des différentes phases. Au cours de la phase de maturation, sur des composteurs en contact avec le sol, la macrofaune du compost (vers, cloportes, collemboles) va recoloniser le tas, alors que celle-ci sera très limitée voire absente sur des plateformes de compostage industriel.

Chaud ou froid ?

Bien qu’ayant un gros faible et ayant mis une grande partie de notre énergie depuis nos débuts dans le développement du lombricompostage, en particulier de volumes intermédiaires (lombricomposteurs collectifs ou d’établissement, pour traiter de 1 à 10 t/an sur un site) , nous pratiquons et maîtrisons l’ensemble des techniques, à froid, à chaud, en plein sol ou hors sol, avec ou sans viande. Le tout est de s’y retrouver pour choisir la meilleure solution possible, en fonction des déchets à valoriser, de la typologie du site et bien sûr du facteur humain.

Ainsi, le vermicompostage possède de nombreux atouts pour le traitement des matières d’origines végétales. Low-tech et très malléable, il implique moins de manutention dans sa gestion et ne nécessite pas forcément d’approvisionnement en broyat, ressource de plus en plus sollicitée par l’agriculture, les paysagistes ou encore les filières de l’énergie. La matière produite est globalement plus stable (matière organique très décomposée), homogène et riche en micro et macro-organismes. Le processus, si bien maîtrisé, émet moins de gaz à effet de serre que le compostage thermique. Enfin, cette méthode, qui s’appuie sur le vivant et le fonctionnement des sols en milieu naturel, est aussi favorable à la biodiversité, faisant la part belle aux macro-organismes (vers, insectes, collemboles, mollusques,…), maillons indispensables de la chaîne alimentaire.

A contrario, le compostage thermique est nécessaire pour valoriser des matières grasses, d’origines animales ou les restes de repas en sauce. Il sera plus efficace pour neutraliser les graines et adventices. La technique étant également plus courante et documentée, il est parfois plus facile de la mettre en place en s’appuyant sur un réseau de guides composteurs existants (bien que nous encouragions tout de même ceux-ci à observer et à favoriser le vivant, sans chercher systématiquement à provoquer une montée en température qui peut s’avérer parfois contre-productive).

Enfin, pour traiter les matières délicates (cuit, carné, gras) tout en conservant les avantages du vermicompostage, il est possible de coupler les deux procédés, en effectuant un pré-compostage thermique court suivi d’une phase de maturation optimisée par l’apport de vers.

Difficile de s’y retrouver ? Venez donc nous demander conseil !